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Divers & variés
25 octobre 2007

Quatre-vingt sept

Titre trompeur, rien à voir. Le temps s'étire, moins qu'avant, la fin de la journée, les sanglots lents, les pavés de la place et la fontaine qu'ils vont recouvrir pour l'hiver. Mon investissement de l'année, c'est sans conteste ce laptop, fidèle et portable. J'en aurai écrites, des conneries, sur ce clavier. Un clavier allemand, je me suis habitué, fini l'AZERTY, il ne me manque que la cédille et le i avec des trémas, je les rattrape avec le correcteur orthographique. Un petit écran lumineux, partenaire de nuits blanches ou de paresses canapées (non, pas de contrepèterie), de longs voyages et de bureaux immuables. Un hymne à l'attente. J'écris que j'attends, en fait, je me le cache, je me l'avoue, je figure-de-style l'évidence. J'attends quoi? Si je le savais. De l'attente comme activité principale et incompressible. De l'attente qui a quelque chose de tellement plus fascinant au crépuscule. De l'attente comme philosophie.

_red_lightNon, tu sombres trop dans ton trip, sors-toi de cette spirale dérélictueuse et prends-toi en mains. Regarde le côté positif, emplis-toi de positif, déborde de positif, fourres-toi-en jusque-là. Prends le positif dans les gens, dans la musique, dans le gasoil et les journaux populistes. Je sors pour aller chercher mon quatre-heure tardif, je flâne dans l'ombre qui s'étend et les gens très occupés qui passent, vite, avec des attachés-cases ou des sacs à mains modèle militaire. La boulangère, enfin, celle qui allume le four, téléphone, me sert d'une main, poliment. Je prends ce qu'il y a, je dois admettre que j'ai développé une faiblesse coupable pour les croissants au marzipan (la pâte d'amandes, quoi). La place s'assombrit, lentement, le trafic du soir s'exténue aux feux. Ils n'ont pas encore sorti les décorations de Noël. Cela ne saurait tarder. Et pendant trois semaines, ça sentira la vinasse chaude et la friture aux coins de rues. On pourra, à prix d'or, acheter des petites cochonneries cadeaux en bois sculpté ou des bougies larges et courtes, aux motifs non païens. Je reprends l'ascenseur, je suis paresseux. L'euphorie s'étendra aux bâtiments, à l'intérieur des magasins. Et l'on vendra des sapins écourtés aux coins opposés des mêmes rues.

Le pied pour sapin en fonte est resté à la cave, elle ne l'a pas emmené à Budapest. C'est bête, parce que moi, je n'en ai pas vraiment usage. Je pourrais le reconvertir en quelque chose d'utile. Non, apparemment, le concept d'objet utile a déserté mon appartement en même temps. Il ne reste que du quotidien, du procédural. Du fonctionnel. On se croirait dans un bureau, ce bureau. Du fonctionnel poli, vernissé, même le câble suit la rainure. Et la moquette: un chef-d'œuvre de fonctionnalité. Si le Big Lebowski avait pris ça, il n'y aurait pas eu d'histoire. Allez, soyons fous, je regarde par la fenêtre. J'aime bien regarder par la fenêtre. C'est mon côté grabataire. Durant la journée, j'ai développé un système, je fais comme si je vérifiais les radiateurs, pensivement. Maintenant, ils sont chauds, c'est moins drôle. Inouï le nombre de camions qui passent, ce soir. De l'autre côté, il y a un autre immeuble de bureaux. Je suis bête, je n'ai jamais pensé à faire ce que tous ceux qui ont des bureaux dans un immeuble en face d'un autre immeuble où il y a des bureaux font. Regarder dans les bureaux, quoi. Mais je n'ai pas de jumelles et je suis tout myope à force d'avoir un écran aussi petit.

Non, ne critique pas mon laptop, il est très bien. C'est-à-dire... juste un peu de speckle. Ah oui? Alors regarde la définition de speckle de plus près, au lieu de faire la maline. Et apprend qu'en français, on dit tavelures, au lieu d'un anglicisme de bas étage qui ne parle à personne. Et que pour avoir du speckle, comme tu dis, il faut un faisceau de lumière cohérente spatialement! Tu en as vu, de la lumière cohérente spatialement, dans ce bureau, hein, dis? Non mais! Bon d'accord, ça partait d'un bon sentiment. Non, je ne m'énerve pas, j'explique. Oui, je sais. Non, mais je... Oui, d'accord, mais... Ah non, je n'avais pas vu ça comme ça. Bon. Euh... t'es fâchée?

Bref, si mon séjour ici devait perdurer, je requérais de mon management Haimé (avec un grand H) une paire de jumelles. Je dirai que c'est pour la veille technologique. En plus, double emploi: avec ces jumelles, on peut certes regarder les bureaux d'en face (somme toute assez peu fascinants). Mais on peut aussi observer les gens à l'arrêt du tram (beaucoup plus intéressant). Enfin je dis ça, hein, ce n'est pas que je sois un habitué de ce genre de pratiques, hein, c'était purement rhétorique. Comme mon boulot, pour l'instant. Un instant lui aussi rhétorique, car assez allongé. Alors je cherche à me diversifier.

Il est tard, j'attends ici, attelé à un clavier, une apparition féminine tardive et improbable. Je dérive, je délire. Mais jusqu'ici, tout va bien. La preuve, je vais reprendre de l'eau. Et comme dehors il fait noir, maintenant, je fixe les points rouges, ignore ma réflexion dans la fenêtre. Quatre-vingt sept. Bientôt cent. Le nombre de messages que j'ai postés sur ce blog. Si j'y croyais, j'en ferais presque un appel interjectif à une divinité quelconque.

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Commentaires
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87, j'ai pensé un moment que tu parlais du cours du pétrole d'hier (qui est monté ce matin à 91 :-)... )<br /> <br /> Je suis partant pour une soirée "The Big Lebowski", je fournis la Khalua.
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