Le zoo
Hier, nous sommes allés au zoo. C’était bien. Plein d’animaux non locaux et
d’humains de même. Ce zoo, soyons francs, est bien joli, bien arrangé, bien
entretenu, contient une quantité honorable d’animaux suffisamment exotiques et
suffisamment actifs pour faire passer deux bonnes heures. Mais un peu cher.
Cela doit déjà être du commerce équitable, à ce niveau de prix. Mais bon, je
paye, pour que Mamie et le Petit soient contents. Papi, lui, n’aime pas les
zoos et argue que, y étant déjà allé l’année dernière, cette visite supplémentaire
est donc superflue. Bon.
La bonne nouvelle de l’entrée, c’est qu’il y a eu depuis l’année dernière
plein de naissances : deux girafes, deux lions, des cacatoès et sûrement
une ou deux galinettes cendrées. On va donc voir les
girafes, à la demande expresse du Petit, à qui j’avais vendu la girafe comme
argument massue pour le programme de l’après-midi. Et elles sont là, les
girafes. Mais qu’est-ce qu’elles sentent mauvais… A côte, un enclos de manchots
dépressifs, serrés sous un arbre, abattus au point de ne même pas pouvoir en
faire le tour de manière répétitive, comme tout animal de zoo qui se respecte.
Plus loin, les loutres, dans leur magnifique écosystème® recréé, font la grève.
C’est pas encore l’heure de la bouffe, alors on ne va pas faire des heures
supplémentaires, non plus, faut pas déconner. Apparemment, elles n’ont pas été
atteintes par les conseils présidentiels : plus de travail= plus de
poissons. Mas non, elles s’en foutent, on peut juste les voir dormir
paisiblement par une petite fente qui donne sur leur home sweet
home douillet.
Je commence à me demander si c’était une bonne idée d’y aller, au zoo, à
l’heure de la sieste. Mais ça permet aussi de maintenir la quantité
d’humanoïdes dans les allées à un confortable niveau. Le petit panda glande sur
une branche du haut, pendouille. Un suricate garde l’entrée de la tanière à
l’intérieur de laquelle, de toute évidence, les autres glandent. Les wallabies
glandent en mangeant des pommes à l’ombre (si). Les tigres glandent, chacun sur
leur plate-forme d’arbre à (gros) chats. A peine un petit battement de queue.
Les guépards, pareil lamentable spectacle de fier prédateur vautré dans
l’herbe, à côté de sa mare de pastis d’eau fraîche. Les jaguars… ah
tiens, non… mais qu’est-ce qu’ils font ? Ah… Maintenant je comprends
pourquoi il y a des naissances, dans ce zoo… Quelle idée de mettre un mâle et
une femelle dans le même enclos… En tout cas, on ne pourra pas dire que dans de
telles conditions d’hébergement iniques… enfin si, enfin… je me comprends…
Le reste s’enchaîne, les primates joyeux et les lémuriens velus (et
vice-versa) s’empiffrent (c’est l’heure de l’animation repas). Brève inquiétude
devant l’enclos des lémuriens, un touriste corse aurait pris le maki… Non, je
déconne… Les tapirs tapis plus loin cohabitent (comme le cri d’amour du
crapaud) avec des mammifères sud-américains velus, sorte de croisement géant de
lapin, de marmotte et de lama, dont j’ai heureusement oublié le nom (Caipirinhia? Ah non, ça, c’est autre chose). Petit
attroupement de visiteurs plus loin, sur un petit pont enjambant la rivière, je
m’attends à quelque chose de spectaculaire, me faufile, le Petit sur les
épaules… pour voir deux cygnes s’empiffrant de pop-corns…
Ces visiteurs-là doivent vraiment venir de la ville profonde. Et puis l’enclos
des loups à crinière. L’un (l’une ?) dort tranquillement sous un arbre,
l’autre fait les cent pas en regardant avec un peu d’anxiété les soigneurs qui
taillent les haies de l’intérieur. Il me rappelle Papi quand on avait fait
refaire la salle de bains.
Bref, la visite se termine. L’enclos des lions donne une belle image de la famille moderne. Les deux rejetons auprès de Maman, sous l’arbre, et Papa au bord opposé de l’enclos, un peu au vent, l’air ennuyé. Je n’ai pas pu lui parler pour échanger nos expériences, il n’était pas du côté des visiteurs. On repasse voir les girafes (en se bouchant le nez au préalable), remarque une activité chez les manchots, qui sentent venir l’heure du repas, puisque c’est au tour des loutres, enfin sorties de leur torpeur syndicales, pour attraper quelques poissons morts dans un torrent artificiel au fond bleu pour que les touristes voient mieux. On ressort, échappe assez finement au piège de la boutique à traverser en sortie, argumentant qu’on avait déjà deux ours et un koala à faire tenir dans le bagage de retour et que non, il n’y avait pas de place pour un petit lémurien, même bichrome. Et puis on voit la mer et le Petit, épuisé, s’endort sur Papa jusqu’à la maison (ça fait un bout…). Paisible.